Homélie du 1er Janvier 2025, Marie, Mère de Dieu par Père Jean-Marc

Marie, Mère de Dieu

Nombres 6, 22-27                Galates 4, 4-7              Luc 2, 16-21                             

Je trouve très heureux qu’en ce 1er janvier, où nous échangeons si volontiers des vœux, la liturgie nous fasse entendre cette magnifique bénédiction que Dieu confie à Moïse : « Que le Seigneur te bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il te prenne en grâce !  Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix ! »

Mais une telle formule liturgique est à bien comprendre. Car elle ne peut être confondue avec les vœux que nous nous adressons mutuellement. Ceux-ci, aussi sincères soient-ils, sont de l’ordre des souhaits sur lesquels nous n’avons en réalité aucune prise, et qui, hélas, sont bien incapables de modifier le cours des évènements ou de faire advenir ce que nous désirons pour les autres comme pour nous-mêmes.

Par contre, les paroles de bénédiction que Dieu transmet aux prêtres juifs, par l’intermédiaire de Moïse, sont des paroles efficaces, qui sont à mettre exactement sur le même registre que les paroles que nous trouvons dans le Livre de la Genèse à propos de la création : « Dieu dit, et cela est. »

Il est d’ailleurs intéressant de noter que la langue hébraïque ne comporte pas le subjonctif. Ce qui signifie que lorsque nous prions, par exemple, le Notre-Père : « Que ton nom soit sanctifié ; que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite… », ces demandes ne sont pas à entendre comme des souhaits que nous adresserions à Dieu, avec l’espoir qu’Il les exauce. Ce sont bien plutôt, de notre part, des confessions de foi qui expriment notre adhésion à ce que Dieu est, et à ce qu’Il veut de toute éternité pour nous, ses enfants, Lui dont le Nom est parfaitement sanctifié dans les Cieux par le monde angélique et la multitude des élus déjà présents en son royaume ; Lui dont le Règne ne peut qu’advenir définitivement et la Volonté s’accomplir pleinement.

Mais, est-il besoin de le dire, il n’en va pas de même pour nous du fait de notre condition humaine radicalement blessée par le péché. Nous sommes dans l’incapacité par nous-mêmes d’adhérer à la Volonté du Seigneur et de l’accomplir… sauf à consentir à la volonté aimante du Seigneur qui, infiniment plus que nous, désire que nous devenions des saints, c’est-à-dire des hommes et des femmes saisis par l’Esprit Saint et appelés à devenir témoins de sa présence active et sanctifiante au cœur de nos réalités humaines. Car notre Dieu nous a voulus et créés pour que nous soyons, dans le Christ Sauveur et par la puissance de l’Esprit Saint, ses partenaires et ses collaborateurs dans son œuvre de création, de sanctification et de transfiguration.

Ce que Saint Paul soulignait si fortement dans la seconde lecture en affirmant que Dieu a fait de nous ses fils en Jésus-Christ : « Tu n’es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c’est l’œuvre de Dieu. » Oui c’est l’œuvre que Dieu veut accomplir en nous et à laquelle il nous revient d’adhérer par notre confiance et de collaborer par notre consentement. Voilà notre joie et notre espérance ! Une joyeuse espérance que notre pape François a désiré mettre au cœur de cette Année jubilaire, et qu’il nous appelle à vivre en communion avec toute l’Église.

Car nous, chrétiens, nous avons à être témoins de cette Espérance dont Saint Paul nous dit qu’elle ne peut décevoir si nous la plaçons comme le centre de gravité de nos pensées, de nos désirs et de nos actes !

Or l’Espérance n’a rien à voir avec l’espoir. L’espoir est la perspective d’une amélioration de notre situation à vues humaines : « Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir », dit le proverbe. Et encore : « l’espoir fait vivre ». Mais c’est précisément lorsqu’il n’y a plus d’espoir, lorsque toutes les issues sont bouchées, lorsque les situations tragiques que nous livre l’actualité provoquent angoisse et dépressions, qu’alors surgit l’Espérance.

L’espoir est une notion profane. Par contre, l’Espérance est le plus beau fruit de notre foi chrétienne, elle qui repose sur les promesses de Dieu. Car notre Dieu est un Dieu fidèle, donc fiable. Depuis la venue de Jésus-Christ, notre espérance s’enracine ainsi dans la certitude qu’il sera à nos côtés, quoi qu’il arrive : rien jamais ne peut nous séparer de son amour. Dieu ne nous promet pas la fin des cataclysmes, des injustices, des guerres… mais sa Présence, quoi qu’il advienne.

Comment nous-mêmes demeurer dans cette dynamique de l’espérance ? C’est ici que Marie, notre Sœur, Mère du Christ et notre Mère, nous ouvre la voie par sa propre démarche. Démarche de radicale humilité qui, en la décentrant entièrement d’elle-même, l’établit dans une joyeuse disponibilité aux initiatives du Seigneur. Libre de tout projet et espoir humain elle était pleinement ajustée à l’Espérance qui ne peut décevoir puisqu’elle est fondée en Jésus.

Alors, avec Marie, retenons tous les événements de grâce dont notre existence est tissée, et contemplons la surabondance des bénédictions qui nous sont offertes en Jésus et par Jésus. Et ne cessons pas de rendre grâce au Seigneur par nos louanges, bien sûr, mais davantage encore par l’amour que nous exprimons envers chaque personne rencontrée. Dans ce monde marqué par tant de haines, de violences, de ruptures, il y a urgence à être des artisans de paix.

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