Homélie pour le 13ème dimanche ordinaire B — 2018 par Dom Jean-Marc

Abbaye d’Acey, dimanche 1er juillet 2018

 

13ème dimanche ordinaire B — 2018

 

Sagesse 1, 13-15 ; 2, 23-24           II Corinthiens 8, 7… 15           Marc 5, 21-43            Homélie de P. Jean-Marc

 

L’Évangile vient de nous livrer deux histoires de guérison avec le retour à la vie de deux femmes : la toute jeune fille du chef de synagogue qui, à 12 ans, est mourante, et cette femme, nettement plus âgée, qui depuis 12 ans souffre d’hémorragies et voit sa santé et ses biens de plus en plus compromis.

Mais à trop insister sur les miracles accomplis par Jésus, nous ferait passer à côté de l’essentiel du message des Évangiles qui porte, non pas sur l’exceptionnel et le merveilleux, mais sur la foi, c’est-à-dire sur notre relation personnelle avec le Seigneur Jésus.

Certes Jésus ressuscité, aujourd’hui bien plus que du temps de sa vie publique, a le pouvoir de guérir et de sauver les personnes proches ou lointaines que nous lui confions. Et Dieu sait si dans l’océan des situations de détresse que connaissent nos contemporains, les intentions de prière ne manquent pas !… Qui de nous ne désirerait reprendre à son compte ce cri du cœur : « Seigneur Jésus, comme tu as arraché à la mort la fille de Jaïre, comme tu as guéri cette femme incurable condamnée à plus ou moins court terme, prends pitié des personnes que nous te confions, pour lesquelles nous implorons ta puissance de guérison. Renouvelle pour elles tes merveilles et manifeste ta puissance de vie. »

Mais nous savons par expérience que nos prières, même faites avec beaucoup d’insistance et de ferveur, ne reçoivent pas toujours la réponse que nous souhaiterions. C’est bien là le drame de nombreux chrétiens qui, ne constatant pas de résultats tangibles à leur supplication, se laissent gagner par la déception : « Je comptais sur le Seigneur et j’ai crié vers lui. Je l’ai supplié et j’ai espéré en sa miséricorde… et rien ne s’est produit. C’est pourtant lui qui a dit : « Demandez et vous recevrez, frappez et l’on vous ouvrira ! » Déception qui, hélas, peut se transformer en amertume, voire en révolte : « Le Seigneur m’a déçu !… Qu’il ne compte plus sur moi !  »

Voilà pourquoi il importe de ne jamais oublier que les miracles de Jésus relatés dans l’Évangile n’ont d’autre raison d’être que l’affermissement de notre Foi, comme nous le lisons dans l’évangile de saint Jean : « Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom. » (Jean 20, 30-31)

Croire en Jésus c’est entrer dans une relation de confiance aimante avec lui. Une confiance qui ne repose pas sur ce que nous pourrions recevoir de lui (nous serions alors dans un rapport marchand : « Tu me donnes ; je te donne »), mais qui est fondée sur la gratuité et la réciprocité de l’amour.

Faire confiance à Jésus c’est avoir la conviction qu’il est le Seigneur de nos vies et que rien ne peut nous séparer de la fidélité de son amour. Faire confiance au Jésus, c’est avoir cette absolue certitude que, bien que nous ne comprenions pas et que nous ayons même l’impression qu’il nous abandonne, il est bien toujours avec nous, auprès de nous, en nous… et qu’il ne peut abandonner ceux qui, envers et contre tout, s’accrochent à lui comme au Roc qui ne peut décevoir.

Car la vie dont il est question dans les récits évangéliques, et en laquelle le Seigneur veut nous introduire, n’est pas seulement la vie biologique qui tôt ou tard s’achèvera. D’ailleurs, ceux et celles qui ont été miraculeusement arrachés à la mort (comme Lazare, le fils de la veuve de Naïm ou la fille de Jaïre), mourront à nouveau comme tout un chacun car nul n’est éternel.

Oui, notre vie humaine est limitée. C’est ce que l’on appelle “notre finitude” : nous sommes livrés au monde et soumis à l’emprise du temps et des événements qui usent. Ce que la liturgie de l’imposition des cendres, au début du Carême, nous rappelle avec force : « Souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras à la poussière. »

Mais l’Évangile est Bonne Nouvelle, la seule authentique Bonne Nouvelle pour notre monde qui n’en finit pas de se laisser séduire par les mirages de bonheurs éphémères. Si l’Évangile nous rappelle notre finitude ce n’est pas pour nous enfermer dans une vision négative de l’existence, mais pour nous faire découvrir qu’au cœur de nos existences si souvent marquées par les désillusions, les drames et tragédies, le Seigneur nous ouvre un chemin d’espérance et de joie. Ce dont l’Évangile nous parle c’est de la Vie éternelle, une Vie éternelle qui commence dès notre naissance et qui se poursuit, s’amplifie et s’épanouit au-delà même de la mort et de la dissolution de notre corps.

C’est cela dont notre Dieu et Père témoigne par la résurrection de son Fils et qu’il veut nous offrir par ce même Jésus le Christ. Lequel proclame : « Je suis la Résurrection et la Vie. Celui qui croit en moi ne mourra jamais. »

Voilà pourquoi, malgré tous les constats dramatiques que nous pouvons faire face à ce monde d’injustice et de violences, et les mille raisons que nous aurions de nous lamenter plutôt que de nous réjouir, nous pouvons accueillir l’affirmation du Livre de la Sagesse : « Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Il les a tous créés pour qu’ils subsistent ; ce qui naît dans le monde est porteur de vie (…) Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité, il a fait de lui une image de sa propre identité. »

Ouvrons donc toute grande nos vies à Celui qui vient, le Christ Jésus, et maintenons ferme notre espérance.  Car  « nous attendons un Ciel nouveau et une terre nouvelle où régnera la justice. » Monde nouveau que Dieu a préparé pour ceux qu’il aime et qui déjà advient au cœur des réalités de ce monde.

 

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