http://acey.eglisejura.com/homelie-du-4eme-dimanche-de-paques-2017-annee-a-par-dom-jean-marc/Abbaye d’Acey, jeudi 25 mai 2017
Solennité de l’Ascension du Seigneur – A – 2017
Actes des Apôtres 1, 1-11 Ephésiens 1, 17-23 Matthieu 28, 16-20 Homélie de P. Jean-Marc
S’il est une expérience que chacun d’entre nous connaît, quel que soit son âge, c’est bien celle de la séparation, avec tout ce que cela implique : départ, rupture, abandon, perte, deuil.
Eh bien, cette expérience nous permet de comprendre – au moins un peu – ce que les compagnons de Jésus ont vécu avec sa mort violente sur la croix et l’effondrement de tous les espoirs qu’ils avaient mis en lui. Rappelez-vous ce que disaient, tristes et désabusés, les deux hommes cheminant vers Emmaüs après la mort de Jésus : « Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. Mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé. » (Lc 24, 21)
Avec la Résurrection on aurait pu penser que le traumatisme de la séparation allait être surmonté, puisque celui qui avait été arraché à leur affection était désormais vivant et présent pour toujours. Mais la résurrection de Jésus n’est pas une réanimation, un retour pur et simple à l’état antérieur. On l’a souvent souligné : la sortie du tombeau de Jésus n’a rien à voir avec la sortie du tombeau de Lazare. Ce dernier mourra de nouveau pour de bon… comme vous et moi ! Jésus, lui, est vivant pour toujours : « La mort sur lui n’a plus d’emprise. » Et c’est cela que nous célébrons en cette fête de l’Ascension en proclamant à la suite de Saint Paul (cf. la deuxième lecture) que le Christ Jésus est monté au plus haut des cieux : « Dieu l’a établi au-dessus de tout, non seulement dans le monde présent mais aussi dans le monde à venir. Il a tout mis sous ses pieds et, le plaçant plus haut que tout, il a fait de lui la tête de l’Église qui est son Corps. » (Eph 1, 21-23)
Avec l’Ascension, Jésus quitte notre monde, mais ce départ n’est en rien une rupture d’avec ceux qu’il aime. Bien au contraire ! C’est ainsi que dimanche dernier nous entendions : « Je ne vous laisserai pas orphelins. Je reviens vers vous. D’ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi. » (Jn 14, 15-21)
Si, comme nous le célébrons chaque année à Noël, la naissance du Christ Jésus sur notre terre est une formidable « Bonne Nouvelle » pour toute l’humanité, puisque cela signifie que l’Histoire de Dieu et l’histoire des hommes ne sont pas dissociables – Dieu est désormais présent avec nous, pour nous – l’Ascension de Jésus ressuscité amplifie sans mesure cette Bonne Nouvelle.
Désormais la présence de Jésus auprès de son Père lui permet de rejoindre tout être vivant. Il n’est plus limité par les contraintes de l’espace et du temps comme c’était le cas lorsqu’il était au milieu de ses disciples.
De manière paradoxale, l’événement qui aurait dû provoquer tristesse et deuil, devient cause d’une immense joie pour nous. Il faudrait ici reprendre et longuement méditer les mots de Jésus dans les chapitres 14 et 16 de saint Jean :
Vous avez entendu ce que je vous ai dit : Je m’en vais, et je reviens vers vous. Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi. (Jn 14, 28)
Amen, amen, je vous le dis : vous allez pleurer et vous lamenter, tandis que le monde se réjouira ; vous serez dans la peine, mais votre peine se changera en joie. Et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. 16, 20
Jésus, ressuscité qui monte auprès de son Père n’est certes plus visible pour nos yeux de chair. Par contre, il le devient pour nos regards de croyants, puisque désormais il n’est plus extérieur à nous-mêmes mais présent et agissant par son Esprit Saint au plus profond de chacun de nous comme en toute communauté, toute famille, tout groupe réuni en son nom. Voilà pourquoi il affirme :
Je vous dis la vérité : il vaut mieux pour vous que je m’en aille, car, si je ne m’en vais pas, le Défenseur ne viendra pas à vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai. (Jn 16, 7)
L’Ascension est donc notre fête, la fête de l’Église, la fête de tous ceux qui croient en Jésus et qui s’en remettent à lui dans la confiance de l’amour.
Ici il nous faut reprendre l’image très éclairante du « Corps » si chère à Saint Paul : le Christ Jésus est la tête, et nous sommes ses membres. Puisque Jésus, notre tête, est entré le premier dans la gloire du Royaume, nous pouvons être certains que tout le corps suivra. En célébrant l’Ascension de Jésus, nous célébrons, par avance, le rassemblement de toute l’humanité que le Christ, par son sacrifice, réconcilie et unit.
Voilà ce qui fonde notre espérance et nous permet malgré les épreuves et les souffrances de l’existence de demeurer dans la confiance et de rendre grâces. Dans notre vie comme dans notre mort, nous sommes pour toujours unis au Christ comme les membres le sont à la tête. Impossible de les dissocier ! : « Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtus le Christ. »
En cette fête de l’Ascension l’Église ne nous fait pas miroiter un paradis imaginaire. Elle nous annonce la seule vérité capable d’affermir notre foi et de nous maintenir – envers et contre tout – joyeux dans l’espérance : nous sommes ressuscités avec le Christ , et rien ne peut nous séparer de son Amour.
Notre foi en cette présence permanente du Christ nous donne, malgré doutes et découragements, la force et la persévérance de vivre au cœur du monde en fidélité à son commandement d’amour.
Que notre cœur ne se trouble donc pas. Croyons en Dieu, croyons en Jésus, son bien-aimé !
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