N-D d’Acey, samedi 25 mars 2017
Solennité de l’Annonciation 2017
Isaïe 7, 10-14 ; 8, 10 Hébreux 10, 4-10 Luc 1, 26-38 Homélie de P. Jean-Marc
« L’amour ne se conçoit pas sans un besoin impérieux de ressemblance. »
En affirmant cela, le bienheureux Charles de Jésus voulait signifier qu’il ne peut y avoir d’amour authentique du Christ Jésus sans une volonté de configuration, d’identification avec lui. En d’autres termes, nous ne pouvons prétendre aimer le Christ sans faire de notre vie, comme la sienne, une vie livrée pour Dieu et pour nos frères.
« Si Dieu nous a tant aimés, nous devons nous aussi nous aimer les uns les autres et donner notre vie pour nos frères. »
Mais il me semble que la phrase de Charles de Foucauld, « L’amour ne se conçoit pas sans un besoin impérieux de ressemblance. », peut s’entendre de Dieu lui-même, et nous permettre d’entrer dans l’intelligence du Mystère que nous célébrons en cette solennité de l’Annonciation du Seigneur à la Vierge Marie.
Je veux dire par là que si Dieu est Amour – et même n’est qu’Amour, comme l’affirme notre foi chrétienne – il ne peut que désirer, d’un désir impérieux, s’identifier à l’humanité qu’il a créée par amour : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils unique. »
“Dieu–Amour” ne pouvait demeurer à distance de nous les humains dont il a voulu faire ses partenaires et ses collaborateurs. Il était dans la logique de l’être de Dieu de chercher à rejoindre l’humanité et de s’unir à elle : « Le Verbe s’est fait chair et il a demeuré parmi nous. »
« Demeurer parmi nous », et pas seulement “visiter” tel le sauveteur qui se jette à l’eau pour en arracher celui qui se noie puis regagne le plus vite possible la berge. Une telle solidarité ne serait qu’accidentelle et éphémère.
Non ! Le Christ Jésus s’immerge dans notre condition humaine : « Conçu de l’Esprit Saint, né de la Vierge Marie, il a vécu notre condition d’homme en toutes choses, excepté le péché. » (Prière eucharistique IV)
Dieu, dans sa liberté souveraine a décidé de fixer sa demeure pour toujours au cœur de notre humanité et de partager intégralement notre destin. Quand Dieu se met à aimer l’homme ça va loin. Ça va beaucoup plus loin qu’on ne le croit… jusqu’à la mort sur une croix. Et Dieu n’attend pas que l’homme soit aimable. Non ! Il vient sans condition préalable. Le Christ Jésus s’est tellement identifié, assimilé à notre condition humaine qu’il est allé jusqu’à livrer sa vie en prenant sur lui toutes nos blessures et notre péché : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. » Et nous !… nous n’avons qu’à le suivre, à vivre la même démarche que lui : « Si Dieu nous a tant aimés, nous devons nous aussi nous aimer les uns les autres et donner notre vie pour nos frères. »
Cette fête de l’Annonciation nous donne donc de célébrer les Noces de Dieu avec l’humanité. Et l’Église, communauté des croyants préfigure ce qui se réalisera pour l’humanité entière.
Désormais il n’est plus de séparation possible entre Dieu et nous. En Jésus, le Verbe s’est fait homme. Et Jésus ressuscité, glorifié, siégeant à la droite du Père, introduit au cœur de la Trinité Sainte l’humanité de son Corps transpercé et glorifié… et nous introduit avec lui pour toujours dans le Royaume de l’amour et de la joie.
Mais pour que se réalise cette aventure inouïe il fallait une terre sainte, immaculée. Car comment l’Eternel, le Trois fois Saint, aurait-il pu prendre corps dans une chair blessée ? Comment la lumière aurait-elle pu cohabiter avec les ténèbres, la grâce avec le péché ?
C’est en Marie, par Marie, conçue sans péché, que Dieu réalise le dessein d’amour qu’il avait décidé de toute éternité. Nous ne pouvons désormais dissocier l’œuvre de salut que Dieu accomplit par son Fils, Jésus le Seigneur, et l’œuvre de sainteté réalisée en Marie sa Mère et notre Mère.
Aussi en rendant grâce en ce jour (en ce moment-même nous faisons Eucharistie !) pour tout ce que le Seigneur notre Dieu nous donne en Jésus et par Jésus, nous le louons et le bénissons aussi pour Marie sa Mère et notre Mère. En elle, l’Immaculée, notre humanité pécheresse découvre avec émerveillement sa propre destinée de gloire. Purifiée par le sang du Christ et sanctifiée par son Esprit, elle sait qu’un jour, elle aussi, elle deviendra reine : « Ecoute, ma fille, regarde et tends l’oreille ; le roi est séduit par ta beauté. » (Ps 44, 11-12)
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