Homélie pour le 5e dimanche de Pâques année B par Père Jean-Marc

Évangile : Jn 15, 1-8

Dimanche dernier Jésus se présentait à nous comme « le Bon Pasteur ». Et il décrivait sa relation avec chacun et chacune de nous, ses brebis, comme une relation intime, profonde : « Je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent. » Relation vitale, puisque non seulement Jésus nous guide, nous rassure, nous protège, mais il est allé jusqu’au don de sa vie pour que nous soyons libérés de l’emprise du mal et de la mort.

Aujourd’hui, Jésus fait appel à une autre image, celle de « la vigne » : « Je suis la vigne, et vous, les sarments. » Si entre le berger et les brebis il y a un lien très fort, ce lien ne peut supprimer la différence de nature qui existe entre un berger et ses brebis. De plus, le berger et les brebis peuvent exister de manière indépendante.

Par contre, avec l’image de la vigne il n’y a plus de distance ni de séparation puisqu’on ne peut dissocier les sarments du cep. Ces derniers, hors du cep ou à l’écart de la vigne, se dessèchent et meurent.

Entre le cep et les sarments existe donc une relation vitale qui permet à la sève de circuler. Et si les sarments sont taillés (comprenez : sont éprouvés), c’est pour que la sève circule mieux et favorise une meilleure fécondité pour l’ensemble de la vigne.

Ainsi, en va-t-il de notre relation avec le Christ. De même que le sarment n’est rien et ne peut rien en dehors de la vigne, nous, les disciples du Christ, nous ne pouvons vivre en dehors de lui : « Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est, comme le sarment, jeté dehors, et il se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent. Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous. Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour moi des disciples. »

Mais l’image de la vigne nous dit encore davantage. Jésus n’est pas seulement le cep qui porte les sarments. Il est la vigne dans sa totalité, cep et sarments. Nous sommes ici sur le même registre qu’avec l’image du “Corps” (si fortement mis en lumière par saint Paul), qui nous dit que dans le Corps du Christ qu’est l’Église, Jésus est la tête et nous sommes ses membres. Mais Paul ajoute encore que le Christ Jésus est également le Corps tout entier, tête et membres. C’est donc en Lui et par Lui, Jésus, que la vie circule dans chaque sarment comme il irrigue tout le corps. « De même que le serment ne peut pas porter du fruit par lui-même, s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi. »

Voilà ! le mot le plus essentiel de cet Évangile est prononcé : « Demeurez » (nous le trouvons 8 fois en quelques versets) : « Demeurez en moi, comme moi en vous. » Nous avons ici la clé de ce qu’est le cœur de notre vie chrétienne et la source à laquelle elle puisse au dynamisme spirituel : « Celui qui demeure en moi, et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruits, car en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. »

Une telle affirmation est à bien comprendre. A un niveau purement humain, on peut parfaitement vivre sans référence au Christ – ce qui est le cas pour l’immense majorité de nos contemporains. Mais quiconque prend au sérieux l’Évangile sait bien que Jésus, en nous parlant de son Père et du Royaume des cieux, nous révèle une plénitude de vie et de bonheur que notre société paganisée est incapable de concevoir : « A quoi bon gagner le monde entier, si c’est pour perdre son âme ! »

Par la foi, nous savons que les promesses de Dieu sont infiniment plus réelles que ce que nous percevons par nos sens et par la raison… Et surtout qu’elles sont éternelles, alors que ce monde (et tout ce qui le constitue) est en train de passer pour disparaître un jour.

« Demeurez en moi, comme moi en vous. » Oui, Frères et Sœurs, demeurons dans le Christ Jésus puisqu’il demeure en nous. Pour ce faire, nous n’avons pas besoin de nous brancher sur lui. Nous le sommes déjà par notre baptême. Il s’agit en fait de demeurer en Lui afin que sa Vie de Ressuscité circule en nous et entre nous, et qu’ainsi nous soyons des hommes et des femmes porteurs de sa lumière, de sa paix, et contagieux de sa sainteté. Rappelez-vous les paroles si fortes de l’Apôtre saint Jean dans la 2ème lecture de cette messe : « Petits enfants, n’aimons pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité. Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît toutes choses. Or, voici son commandement : mettre notre foi dans le nom de son Fils Jésus Christ, et nous aimer les uns les autres comme il nous l’a commandé. »

Notre vocation à la sainteté est quelque chose d’infiniment plus simple que nous n’imaginons. Il importe simplement de consentir à l’action de l’Esprit en nous et de laisser la vie de Dieu (sa sainteté, si vous préférez), se déployer en nous, afin de correspondre à la volonté du Seigneur, et de donner les fruits qu’il attend de nous : « Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous donniez beaucoup de fruit. »

Ainsi en va-t-il de notre vie ! Pour qu’elle soit heureuse – et par conséquent féconde, rayonnante – elle doit s’enraciner dans l’amour du Christ et se laisser guider par son Esprit. Ce que nous sommes incapable de réaliser par nous-mêmes le Seigneur le réalisera lui-même pour nous, non pas malgré nous, mais avec nous. Qu’il en soit éternellement béni.


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