19ème dimanche ordinaire – année A – 2020
I Rois 19, 9a.11-13a Romains 119, 1-5 Matthieu 14, 22-33 Homélie de P. Jean-Marc
Jésus est donc sur la montagne, seul. Et il prie…
Les disciples, eux, sont sur la mer dans une barque battue par les vagues et qui ont bien du mal à lutter contre le vent contraire qui les empêche d’atteindre l’autre rive où Jésus leur a enjoint de le précéder.
Le contraste est fort entre le Christ Jésus priant son Père dans la solitude paisible de la montagne, et le trouble des disciples qui se débattent avec les éléments contraires. Contraste encore accentué lorsque notre récit montre Jésus venant vers eux en marchant sur la mer. Phénomène étrange qui loin de susciter leur émerveillement les bouleverse et les panique : « Pris de peur, ils se mirent à crier : “C’est un fantôme.” »
La parole de Jésus « Confiance ! c’est moi ; n’ayez plus peur ! » ne semble cependant pas suffire à apaiser leurs craintes puisque Pierre exige un signe : « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux. » Et c’est alors que nous avons la fameuse scène de l’apôtre marchant lui aussi sur les eaux… mais qui très vite, voyant la force du vent, panique et commence à enfoncer.
Alors, au cri de détresse de Pierre : « Seigneur sauve-moi ! » Jésus répond aussitôt en lui saisissant la main : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? »
Voyez-vous, Frères et Sœurs, cet évangile, comme d’ailleurs tout l’Évangile, n’a d’autre but que de nous enraciner dans la confiance en Jésus. Certes, comme Pierre, nous croyons en Jésus puisque nous invoquons son nom, nous le célébrons, nous recevons le pain de sa Parole et de son Eucharistie, mais, le plus souvent, notre foi est fragile, incertaine, fluctuante. Il nous faut bien reconnaître que nous n’osons pas réellement tout miser sur lui et lui faire confiance envers et contre tout.
Au lieu de maintenir notre regard fixé sur lui, nous nous laissons gagner par la peur, déstabilisés par les coups durs et les épreuves de la vie. C’est alors qu’à chacun et chacune de nous Jésus, comme à Pierre, adresse cette parole : « Homme, ou Femme, de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » Et il pourrait ajouter : « Oui, pourquoi dans ta vie, dont, mieux que quiconque, je connais les zones d’ombre et les moments de découragement, pourquoi doutes-tu de ma présence ? – Faut-il donc que tu attendes d’être acculé à une détresse extrême pour te tourner vers moi et crier : “Seigneur sauve-moi !” ? »
Notre foi en Jésus n’est pas une assurance tout risque nous préservant des coups durs de l’existence. Les événements si souvent déconcertants, éprouvants, font partie de notre condition humaine et Jésus lui-même y a été confronté, subissant de plein fouet le mensonge, la lâcheté et la violence humaine jusqu’à mourir crucifié comme le dernier des condamnés.
Si l’Église nous invite à méditer cet épisode évangélique, c’est pour nous affermir dans la confiance. Car malgré toutes nos capacités notre assurance ne peut se fonder sur nous-mêmes qui sommes fragiles, vulnérables et inconstants. « L’homme n’est qu’un souffle. » dit la Bible. Et elle ajoute : « Malheureux celui qui met sa confiance en lui-même. » Ce qui compte – et c’est en cela que nous devons imiter Pierre – c’est de crier comme lui : « Seigneur sauve-moi ! »
Dans ces simples mots est caché le mystère simple et profond de la confiance : Jésus est le seul qui peut nous sauver, c’est-à-dire non pas seulement nous arracher à un mauvais pas, mais nous conduire à la plénitude définitive de la Vie et de la joie.
« Seigneur sauve-moi ! », ou plutôt « Sauve-nous ! » Car nous ne sommes jamais seuls. Comme les disciples dans la barque nous sommes, en Église, une communauté de foi, d’espérance et d’amour où, malgré bien des lourdeurs et des turpitudes, non seulement, tous les membres sont solidaires les uns des autres, mais se savent également en responsabilité par rapport au monde et à son avenir.
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