Homélie pour la Solennité de la Toussaint 2024 par Mgr Gérard Daucourt Évêque émérite de Nanterre

SAINTETÉ DE LA CLASSE MOYENNE
Toussaint 2024

Dieu seul est saint. La Bible ne cesse de l’affirmer. Nous le disons et le chantons souvent. Alors, un seul saint ou tous saints ?

Nous connaissons la réponse de la foi : oui Dieu est le seul Saint mais il s’est incarné, il est venu nous partager sa vie qui n’est que sainteté, qui n’est qu’amour, qui n’est que miséricorde.

Nous avons été sanctifiés au jour de notre baptême, on peut dire aussi divinisés. Il nous est demandé de correspondre à cet événement et de faire de toute notre vie une marche vers  Dieu, vers la sainteté plénière, vers l’amour  Mais il nous faut sortir de notre tête cette idée que la sainteté ce serait la perfection morale, qu’un saint, une sainte serait un homme, une femme parfaite. Les saints sont des pécheurs convertis et parfois de très grands pécheurs. Mais ils ont tenu bon, reprenant sans cesse la route de la sainteté après leurs péchés. Leur vie a été souvent un combat.

Les exégètes et ceux qui connaissent l’hébreu et le grec nous disent que le mot Bienheureux qui caractérise les Béatitudes qui viennent d’être proclamées, ce mot n’est pas la seule traduction possible. Une racine hébraïque invite à traduire aussi par En marche. C’est intéressant. Lisez les Béatitudes en remplaçant Bienheureux par En marche. Vous constaterez que ça rend le texte d’une certaine manière plus réel car une dynamique s’installe : c’est en marchant dans la foi sur la route de la sainteté que nous pouvons être heureux tout en étant pauvres, heureux tout en pleurant, heureux tout en étant persécutés pour la justice. Les épreuves ne sont pas supprimées mais nous tenons par l’espérance et nous  sommes bienheureux au fond de notre cœur car une joie s’y trouve et elle est une force qui nous permet de tenir.

La fête de la Toussaint vient donc nous relancer pour que nous vivions toujours mieux le paradoxe des Béatitudes, en marchant malgré les épreuves de la vie et malgré nos péchés. Nous ne pouvons pas nous contenter d’une vie chrétienne médiocre ou d’un « train-train » sans horizon. Les saints « officiels » reconnus par l’Église et les saints connus de Dieu seul nous précèdent et nous attendent. Parmi ces derniers il y a certainement des personnes de nos familles ou que nous avons rencontrées et qui, sans être parfaites, ont mené les combats de la vie en marchant sur les chemins de l’amour qui sont bien ceux de la sainteté puisque Dieu est Amour et qu’il est le seul Saint.

Il y a six ans le pape François nous a donné une exhortation apostolique qui a pour titre La joie et l’allégresse pour faire résonner une fois de plus l’appel à la sainteté .(N°2). On peut y lire ceci : J’aime voir la sainteté dans le patient peuple de Dieu : chez ces parents qui éduquent avec tant d’amour leurs enfants, chez ces hommes et ces femmes qui travaillent pour apporter le pain à la maison, chez ces malades, chez les religieuses âgées qui continuent de sourire. Dans cette constance à aller de l’avant chaque jour, je vois la sainteté de l’Église militante. C’est cela souvent la sainteté « de la porte d’à côté », de ceux qui vivent proches de nous et sont un reflet de la présence de Dieu, ou, pour employer une autre expression, « la classe moyenne de la sainteté.(N°7)

Comment alors ne pas entendre résonner pour chacun d’entre nous quels que soient nos péchés passés, nos échecs et nos souffrances : Bienheureux ! En marche !

P. Gérard DAUCOURT


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